Un conte de Noël en février... Pourquoi pas ?

C’est bête… Une fois, en Italie, on est entrés sous un grand chapiteau où le Ministère du tourisme projetait un petit film vendant les merveilles du pays : aqueducs, ponts, thermes, Pompéi, César, Florence, Michel-Ange, Raphaël, l’Opéra, Venise, Garibaldi, la pizza, les spaghettis, la mode, le design, les voiture, le cinéma. Cette envolée m’a arraché des larmes.
Eh bien, ça m’a fait pareil quand j’ai entendu le conte de Noël que voici. J’en masquerai l’auteur pour que vous puissiez faire le test à l’aveugle et me dire si vous avez senti quelque chose :
Les bergers s’approchent lentement et déposent au pied du lit de paille un fromage de brebis. C’est leur cadeau.
Derrière eux arrivent les Rois Mages, Gaspard, Melchior et Balthazar, qui déposent l’or la myrrhe et l’encens.
Derrière eux, longtemps après, arrive depuis la pointe de l’Occident, d’un autre bout du monde, le marchand de quenouilles, un vieillard avec sa roue qui grince et il dépose ses poupées de lin pour envelopper l’enfant qui grelotte.
Derrière lui, s’approche une jeune fille aux tresses d’or, le chef inondé de blondeur, Blandine, sainte Blandine, elle s’agenouille pour offrir son martyr.
Derrière arrive un anachorète, un moine, c’est l’apôtre des Gaules, Martin de Tour, qui vient déposer sa chlamyde de miséricorde, son manteau. Ça signifie : ce que vous ferez au plus petit d’entre vous, c’est à moi que vous l’aurez fait.
Vient un anonyme qui dépose une rosace et les plans d’un vaisseau renversé. C’est l’architecte de Notre-Dame.
Arrive un roi, pieds nus, avec la couronne d’épines. Au pied du lit de paille, il fait la promesse, en partant en terre de promission, de troquer sa couronne de puissance contre une couronne de souffrance.
Derrière lui arrive Michel-Ange qui dépose sa Piéta.
Un musicien dépose son orgue. C'est Jean-Sébastien Bach qui offre Que ma joie demeure.
Un philosophe Pascal, s’écrie Joie, joie, pleurs de joie, certitude !
Arrive Verlaine et sa Romance d’amour.
Marcel Proust et toute la littérature. Ils sont là des centaines et des centaines.
Arrive un homme un peu gêné avec une moustache. Il passe sa mort à Sète. Il est incrédule mais il se met à genoux. Il gratte sa guitare et il dit :
Par les quatre horizons qui crucifient le monde, par tous ceux dont la chair se déchire ou retombe, je vous salue Marie.
Cette foule, cette houle d’artistes, de pèlerins, de saints, d’anonymes, d’humbles, de fracturés, de pauvres entre les pauvres, elle sait depuis 2000 ans que cette crèche , avec ce petit enfant entre le bœuf et l’âne qui le réchauffent , elle sait que cette crèche, elle n’a pas préparé un système, elle n'a pas préparé un royaume, elle n'a pas préparé un empire. Elle a fondé une civilisation.
Photo : cimetière de Gênes.
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