top of page

Quels livres emporter dans une ville déserte ?



La question était posée hier par Pierre Berville sur Facebook. Je me suis remis à lire des ouvrages contemporains. Je l'ai dit, le dernier Houellebecq s'avale vite malgré ses 700 pages. Des choses excellentes mais j'ai dit mes réserves. Le dernier Pierre Lemaitre, Le Grand monde, très bien fait, très fin, d'excellents dialogues, Saïgon pendant la guerre d'Indochine comme si l'auteur y avait vécu. Après, c'est beaucoup un roman policier. J'aime les suspens comme tout le monde, mais je ne comprends pas bien pourquoi un auteur se donne tant de mal à fignoler page après page les détails d'une intrigue qu'on va oublier dès le livre refermé. Ce qu'on retient, c'est l'ambiance saturée d'humidité moite de Saigon, l'ambiance délétère de l'occupation française, la férocité de la guerre que le Viêt-minh fait aux légionnaires français, c'est aussi les manigance d'une perverse narcissique. Voilà l'intérêt. Ce qu'il nous faut, c'est, mieux qu'un message, un regard.

Après, j'ai entamé le dernier Nicolas Mathieu, Connemara, et je tombe sur la page 19 qui m'a coupé le souffle. La voici :


Au collège, Lison, passait ses soirées à flirter on line sur l’ordi que ses parents lui avaient offert à des fins de réussite scolaire, parlant interminablement de cul avec des mômes de son âge aussi bien qu’avec des pervers de cinquante balais qui pianotaient d’une main, des internautes singapouriens ou son voisin auquel elle n’aurait pas pu dire un mot s’il s’était assis à côté d’elle dans le bus. À travers la nuit numérique, les conversations fusaient à des vitesses ahurissantes, annulant les distances, rendant l’attente insupportable, le sommeil superflu, l’exclusivité inadmissible. Après 23 heures, une fois la famille endormie, on commençait à se chauffer pour de bon. Les fantasmes se formulaient en peu de mots, tous abrégés, codés, indéchiffrables. On finissait par s’adresser des photos, etc.


Vous vous dites que je ne lis que les best-sellers du jour. C'est ma foi vrai. La preuve, ce sont les deux ouvrages dont je vous ai déjà parlé :


- La Ville des ânes (10 euros) de Pierre Berville que j'ai nommé plus haut. Je vous mets le commentaire que j'ai laissé sur Amazon : C’est un régal ! C’est le genre crime (ou pas crime) et enquête à suspens et péripéties, mais, si on ne lâche pas ce petit roman, c’est surtout pour son écriture. Il se passe quelque chose à chaque paragraphe. Pas un pouce de gras. Un bel art du portrait. C’est écrit avec esprit et humour avec, en prime, une satire très informée des milieux à l’argent trop facile.


- Lettres d'un jeune homme (6 euros) dont je suis à la fois l'auteur et le lecteur. Je vous en mets un extrait dans mon prochain billet.


Attention, ces deux derniers livres, on ne peut se les procurer que directement sur Amazon.


Photo : piratée à Arles en septembre. Pardon à l'auteur.

Comments


bottom of page