Pudeur et Bikini
Ce matin, France Cul nous rasait. Alors j’ai mis France Inter. Bingo ! C’était sur le bikini. Je savais pas que le maillot 2 pièces révélant le nombril était une deuxième bombe atomique qui avait pris son nom de l’atoll du Pacifique où avait explosé la première. Comme les mannequins refusaient de présenter une tenue si indécente, on est allé chercher une stripteaseuse qui n’a eu qu’à en rajouter. Ce fut une grande libération parce que jusque-là, sous le régime patriarcal, le corps des femmes était tabou. Pauvres hommes ! Surtout que le string s’est mis à échancrer de plus en plus le bas et à révéler les fesses.
Mais, justement, disait une autre émission, faut pas non plus que le corps des femmes devienne un objet de concupiscence pour les mâles ! Voyez nos musées remplis de nudités, toujours des femmes comme par hasard, voyez la pub qui excite sans cesse le voyeurisme masculin, voyez la mode indécente des shorts ras l’bonbon ! Après tout, c’est peut-être les musulmanes voilées qui ont raison…
La veille, l’émission était sur le droit à se promener torse nu. Au bout d’un moment, on a fini par se demander si les femmes aussi pouvaient le faire et si les seins étaient un objet sexuel. On a dérivé sur les femen. Et voilà 5 minutes d’occupées.
Bref, la pudeur est-elle un vice ou une vertu ? Et la nuance et la subtilité sont-elles des qualités ? Le patriarcat et ses affreux abus ? Oui, bien sûr. Ou, plutôt, Non ! Mais ne pas oublier qu’avant la pilule, une fille impudique se retrouvait vite avec un enfant sur les bras. À cause de l’égoïsme du géniteur qui disparaissait dans la nature ? Évidemment, mais à propos de nature, vous avez certainement remarqué une chose : ce sont toujours les femmes qui font les frais de la grossesse, et, en plus, ça dure en moyenne 9 mois, ce qui laisse largement au géniteur le temps de prendre le large. C’est bien malheureux mais c’est comme ça. Alors, la pudeur pourrait bien être aussi un moyen contraceptif, aussi matriarcal que patriarcal.
Rousseau est le grand psychologue de la pudeur. Je résumais son propos à mes étudiantes troublées en leur disant : Faites-le attendre une heure, il vous aimera une semaine. Faites-le attendre un mois, il vous aimera un an. Faites-le attendre un an, il vous aimera pour la vie.
Et Stendhal ? Dans son traité De l’amour, il fait l’éloge de la pudeur à cause de l’imagination. Pour lui, la passion se nourrit d’obstacles et d’attentes. Valmont éprouve des émotions 100 fois plus intenses en faisant l’amour avec madame de Tourvel que don Juan avec toutes les Marie-couche-toi-là qu’il rencontre.
Vous pouvez juste, dans ces lignes, mon lecteur, tirer le brin qui vous plaît comme au mikado. Ou plutôt deux brins, sachant que la vérité a toujours un pied dans chaque camp.
Photo : pub Dior homme.
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