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Et le jardinier, il est pas beau le jardinier ?


Notre tilleul était réputé dans tout le canton, c'était celui qui embaumait le plus. Les abeilles et les autres insectes en raffolaient et, en juin, nous jouissions d'un parfum musical. Las, il a fallu l'abattre car la foudre lui avait donné un grand coup de sabre et il, penchait de plus sur le toit du cabanon. On en a fait des gros rondins qui ressemblaient à des tambours de colonne parce que vous n'êtes pas sans ignorer, mon lecteur de la ville, que les vieux tilleuls ont une écorce parcourue profonds sillons comme une roue dentée. Quand on les a bien rangés à plat les uns sur les autres, Sabine qui a un sens inné des métaphores a dit : "On se croirait dans Les Temps modernes !"

J'ai repensé à eux quand il a fallu aller au bois, confinement au bord de la cheminée oblige. Mais au bout de plus de dix ans, la grande nature, comme dit Baudelaire, était passée par là. Quand j'ai pris les coins et la masse, les tambours de colonne sont tombés en poudre, comme dit Ronsard des pauvres morts Seul le cœur avait résisté et j'ai dérangé des colonies de fourmis volantes bien engourdies qui hibernaient là-dedans et qui n'auraient désormais d'autre choix que le gel ou la flamme. Restait une masse ligneuse décomposée que j'ai chargée dans des brouettes pour garnir ma belle jardinière, précieux apport carbonné au compost azoté.

J'avais promis, mon fidèle lecteur, de vous offrir le spectacle de ma belle jardinière, une fois plantés les lentisques. Vous aurez le jardinier en prime.




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