Dortoir ou Librairie : la guerre des cultures

À l’exemple de Dieu, il faut nommer les choses. J’ai appelé loi d’ambivalence le concept anthropologique que je crois avoir forgé. Un de mes collègues a fait sa thèse sur les noms de personnages dans les grands romans. Dans notre maison, il y a déjà Le Confiturier, La Chapelle, Le Pigeonnier. Comment nommer la pièce multifonctions que je suis en train d’aménager ? Je veux y mettre mes archives et y construire des châlits pour les enfants comme dans Le petit Poucet. Daniel m’a soufflé La Librairie, à l'instar de Montaigne qui écrit :
Chez moi, je me détourne un peu plus souvent à ma librairie, d’où tout d’une main je commande à mon ménage. Je suis sur l’entrée et je vois sous moi mon jardin, ma basse-cour, ma cour, et la plupart des parties de ma maison. Là, je feuillette à cette heure un livre, à cette heure un autre, sans ordre et sans dessein, à pièces décousues ; tantôt je rêve, tantôt j’enregistre et dicte mes songes en me promenant.
Les jeunes se sont immédiatement récriés. Ils voulaient inviter tous leurs amis et ils n’allaient quand même pas leur expliquer qu’ils logeraient dans une bibliothèque comme au XX° siècle ! Ils voulaient bien dormir au Dortoir mais dans une Librairie, jamais de la vie !
J’ai tenu bon. Smartphone ou pas, ils dormiraient à La Librairie, parmi mes rayonnages de livres (choisis) et d’archives (sélectionnées). Je sais qu’il s’en ouvriront pas un mais peut-être que, pendant leur sommeil, quelque chose en infusera dans leur jeunes cervelles…
Photo : la "librairie" de Montaigne.
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