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De Vachères à Saint-Trop



Chez Proust, il y a le côté de Méséglise et le côté de Guermantes. Nous, à la campagne, on a le côté le Cucuron, plus paysan, et le côté de Lourmarin, plus touristique. Que choisir ? Eh bien, on vient de faire deux excursions coup sur coup. L’une à Vachères, l’autre à Saint-Trop. On peut pas faire plus différent.

Vachères, c’est déjà la Haute Provence, la Provence sèche, le mistral, les lavandes, les moutons. Derrière, il y a la montagne de Lure et les paysages de Giono. On a acheté du fromage de chèvre chez un producteur. On a découvert un pont romain qu’on ne connaissait pas, sur la via Aurelia construite par Auguste. On a rêvé sur des fermes aux volets fermés, aux seuils couverts de lichens.

Saint-Trop, c’est une autre limonade. Je vois déjà se froncer le sourcils des savants austères. Quel chef de rayon a inventé ce terme bêtement commercial de Côte d’Azur, s’indignait Giono !

Pourtant, dès qu’on passe Bormes-les-Mimosas, on découvre une inimitable douceur de vivre. La végétation est luxuriante. Les pins ressemblent à des brocolis. De grosses maisons carrées avec des toits à quatre pentes offrent des façades vieux-rose, ocre ou même oranger. C’est bientôt l’Italie. La presqu’île de Saint-Tropez est à ranger parmi les plus beaux paysages de France. J’ai nagé devant la plage Pampelonne, si voluptueuse. Les privilégiés du show-biz ont bon goût. Comme le village de Saint-Tropez est charmant avec ses tours de portes soulignés de marbre blanc, vert bronze parfois ! Quelles vitrines alléchantes pleines de chemisiers à nouer sur le nombril, de sandales et de strings. Les belles choses ! Michèle a remarqué que les filles ne montraient plus leurs seins sur les plages mais leurs fesses. Comme le spritz était bien dosé au Sube, avec terrasse à l’étage, 15, quai Bailly de Suffren, devant les yachts !

C’est un complet contraste de rêverie. D’un côté la beauté aride, pauvre et rêche de la Haute Provence, de l’autre la tentation baudelairienne du luxe et de la volupté. Sand, sun and sex. Il faut ajouter un 4° S : snob.

Voilà une application de plus de la balance du yin et du yang.


Photo : David Hamilton, 1972.

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