De la sur-conversation
Une sur-conversation, c’est une conversation qui vient après une conversation un peu tendue. C’est intéressant parce que chacun dit ce qu’il a compris et interprété (ou sur-interprété…) mais en général, ça ne sert qu’à aggraver la mésentente. - Tu as dit ceci ! - Non j’ai pas dit ça ! J'sais bien c’que j’ai dit quand même… - Si, tu l’as dit ! - Tu peux me laisser parler ? - Non – Oui - Non... Comme ça, en boucle...
L’autre jour, nous discutions avec notre meilleure amie et elle disait qu’elle, elle aurait bien aimé faire Science Po mais qu’à l’époque, on l’en avait dissuadée parce que c’était réservé aux hommes, alors, elle a fait du chinois. J’étais en minorité en tant qu’homme, et, pour abonder dans son sens, j’ai évoqué l’histoire de Suzanne Borel que j’avais entendue la veille sur France Cul, première femme qui a réussi le concours du quai d’Orsay et qui a eu un mal de chien à se faire admettre dans ce monde de machos. La conversation a ensuite dérivé sur les tuteurs de résilience dont Camus ou Giono ou le grand-père de Michèle avaient bénéficié.
Je ne me méfiais pas mais la nasse était refermée sur moi depuis le début : la sur-conversation qui a suivi a voulu me persuader que j’étais vraiment désagréable à sous-entendre comme ça que notre amie aurait dû être plus combative à l’instar de la diplomate au lieu de se croire battue d’avance. Et que les autres avaient eu bien de la chance, eux, d’avoir joui d’un tuteur de résilience, ce qui n’est pas donné tout le monde. La discussion s’est enferrée et je n’ai pas réussi à m’en dépêtrer.
Un peu après, bis repetita. Notre ami s’indignait d’un incident survenu à propos du sujet du bac de Français. Moi, innocemment, j’ai posé plusieurs questions, Qui ? Que ? Quoi ? pour connaître mon opinion. D’ailleurs, mon opinion, je ne la connais toujours pas car la conversation s’est embrouillée. Michèle s’en est mêlée. (elle prend toujours parti contre moi dans ce cas, ce qui est normal car si le mari et la femme faisaient toujours front commun, ce serait gênant…) Les tri-conversations, c’est toujours un peu compliqué. Seul contre deux (femmes), j’étais écrasé, mon mauvais esprit mis en évidence une fois de plus. Pourtant, dans la confusion générale, j’ai pris conscience tout à coup que si on était bien d’accord pour me donner tort on le faisait pour des raisons opposées et contradictoires. J’ai fait semblant d’en rire. Évidemment, on n’a pas voulu en convenir.
Attention au mauvais esprit, autre nom de l’esprit critique ! Il faut toujours se montrer d’accord avec tout ce qu’on vous dit si on ne veut pas avoir d'ennuis !
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