De la nervosité
Je ne sais pas pourquoi, j’ai repensé tout à coup à la distinction que fait Paul Diel entre deux sortes de gens, les nerveux et les banalisés. Ce terme de banalisé ne me plaît pas. Je le trouve pas clair et en plus inesthétique. Il est peut-être utile pourtant. Le banalisé, pour Diel, c’est celui qui se vautre dans la conquête d’avantages vulgaires, l’argent, le sexe, la renommée. Mais Diel ne condamne pas pour autant ces trois objets, puisque le travers inverse consiste à s’en éloigner avec des cris d’orfèvre, pardon, d’orfraie, pour se réfugier sur un rocher de cristal, la pureté, la morale sévère, la culture, la religion, les livres et toutes les choses du même genre. C’est du temps perdu et c'est un peu ridicule.
On a en somme une voie descendante, sans doute empruntée par le plus grand nombre, celle de l’avidité pour les biens de la terre, d’où le mot banalisé, mais il faudrait faire des statistiques… et une voie montante qu’on pourrait aussi appeler idéaliste.
Tout cela n’est pas très nouveau, j’en conviens. Ça correspond plus ou moins à l’opposition de l’égoïsme et de l’altruisme.
Alors, bien sûr, je me suis demandé dans quelle catégorie je me rangeais. Ce n’est pas si facile. Évidemment, les deux extrêmes me déplaisent autant l’un que l’autre, mais je dois avouer que dans le fond, j’appartiens aux deux catégories à la fois. Oui, je suis sensuel et avide mais en même temps, comme disait qui vous savez, je suis toujours en quête de sens et je voudrais sauver le monde. Bizarre. Ou plutôt, non : Diel appelle justement loi d’ambivalence cette dualité qui fait qu’un pôle est (souvent) inséparable de l’autre. C’est sans doute vrai des idéalistes surchauffés qui se prennent pour des anges mais je ne sais pas si, inversement, les gros matérialistes sont beaucoup tourmentés par des rêves d’harmonie.
Par contre, je veux bien croire qu'un caractère apollinien (j'en ai parlé récemment) consiste à se tenir en équilibre entre les deux polarités sans avoir trop à se forcer. Et vous, mon cher lecteur, vous êtes quoi ? Avouez...
Photo : vu ce matin dans la campagne aixoise.
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