Alliance et filiation à la sicilienne

Depuis notre escapade à Palerme, je continue mon plan sicilien, avec Coppola après Visconti, avec Le Parrain après Le Guépard. Il y a une scène que j’ai revue 4 fois. C’est vers le milieu du film, facile à trouver sur netflix. Je vous rappelle qu’El Pacino, dans le rôle principal du fils préféré de don Corleone, est retourné pour un an en Sicile pour se mettre à l’abri. Le village est accablé de soleil, de poussière et de mouches comme dans Le Guépard. Accompagné de ses gardes du corps, il éprouve un coup de foudre pour l’une des jeunes filles qu’il croise sur le chemin de la fontaine, une Claudia Cardinale locale. Dans le bistrot du village les plaisanteries de garçons se multiplient jusqu’à ce qu’un homme se lève, indigné, car il a reconnu des allusions à sa fille. Al Pacino l'interpelle, se fait passer pour américain, et fait traduire en dialecte ses paroles par son garde du corps. Il présente solennellement ses excuses au père offensé et ajoute avec nonchalance :

Je m’appelle Michael Corleone. Bien des gens payeraient une fortune pour savoir ça. Mais dans ce cas, votre fille perdrait un père au lieu de gagner un mari.

Ce n’est rien moins qu’une demande en mariage. Admirez la façon indirecte dont la demande est faite. Évidemment, un Américain, sapé comme il est en plus, ça ne se refuse pas. ! Mais il y a une menace derrière : le père qui n’a pas envie de recevoir quatre pruneaux dans le bide accepte immédiatement.

Voilà pour le mariage. Maintenant la filiation.

Dans une autre scène, on entend Marlon Brando alias Vito Corleone, avec sa voix douce et cassée, expliquer à un jeune freluquet qu' Un homme qui ne s’occupe pas de sa famille n’est pas un homme. Le sens de la famille est en effet la plus grande vertu des Corleone. Michael prendra la succession de Vito, c’est le sujet du film.

Moi, je voyais vieillir avec inquiétude l’excellent charcutier de Cucuron, Albert. Comme j’ai été rassuré qu’il me révèle que son fils prendrait sa succession. Pareil pour les pistaches. Le maire de La Bastidonne, près de Pertuis, a planté 17 hectares de pistachiers. On a visité vendredi ce champ admirable. Eh bien, lui aussi a un fils qui reprendra le domaine.

Je me suis mis en tête de planter moi aussi un hectare de pistachiers, comme en Sicile, justement. Mais Vincent se fait un peu tirer l’oreille pour mettre la main à la pâte…

Photo : le champ de pistachiers de La Bastidonne.