Dieu est un grand cœur de mère
Pas facile de photographier des papillons, ces "frais libertins de l'azur", comme dit Hugo. J'ai pourtant fini par en coincer quelques uns au jardin botanique de Copenhague. Moi, je veux bien embrasssser la cause animale avec vous mon lecteur qui faites abstinence de foie gras, mais à condition de commencer par les insectes, ces méprisés ! On sait depuis Linné que les fleurs sont le sexe des plantes mais comment ces pénis et ces vulves se rencontreraient-ils sans les insectes ? L'amour à 3 ! Voilà comment tout commence et à quoi il s'agit de revenir. Mais il y a du chemin à faire.
Pierre Leroux écrivait en 1839 :
Quand les premiers chrétiens s’éloignèrent des idoles et désertèrent les temples des païens, ils n’eurent d’abord pour temples que la voûte du ciel. Lisez, dans Minutius Félix, l’admirable entretien d’Octavius et de ses amis au bord de la mer, et jugez si le christianisme n’a pas débuté par là. Jésus lui‑même, dans l’Évangile, ne vit‑il pas au bord des lacs, au sein des déserts, contemplant la grandeur de Dieu et la misère des hommes ? Le plus grand peintre de la nature chez les anciens, Virgile, a déjà jusqu’à un certain point l’âme chrétienne. De Théocrite à saint Basile, qui aimait tant la nature, il y a cinq siècles où, païens et chrétiens, tout ce qui a une vie de désir se tourne avec passion vers la retraite.
Le dualisme, qui malheureusement a tellement marqué le christianisme, sous l'influence de Saint Augustin surtout, fit de la terre une vallée de larmess et du ciel le seul lieu désirable. Balzac disait pourtant que Dieu est un grand cœur de mère et Michelet devait se tourner vers l'hindouisme pour trouver des hommes qui aient une vraie tendresse envers les animaux et la vie organique.
Pour l’islam, aussi, la création est parfaite, un chef d’œuvre absolu, au point de faire de l'acte sexuel une prière à Dieu. La sourate LV dite La fiancée du Coran a la faveur de beaucoup de musulmans. Le refrain « Lequel des bienfaits de Dieu nierez-vous ? » rythme 28 fois l’énumération des beautés de la nature. J'ai déjà mis dans un ancien billet le petit florilège que j'ai fait de ces beautés. Je vous le remets pour le plaisir :
« Les grains de blé disposés par série et les palmiers dont les branches donnent des grappes suspendues », « les olives et les grenades qui se ressemblent et qui diffèrent les unes des autres » (VI, 99), « les cieux et la terre qui se couvrent l’un de l’autre, le soleil, la terre et les étoiles soumis à l’ordre divin » (VII, 52, XVI, 12), « les ombres des êtres qui se courbent devant Dieu les matins et les soirs » (XIII, 16), « la matrice de la femme qui se resserre ou s’élargit » (XIII, 9), « l’homme créé d’une goutte de sperme » (XVI, 4), « les bêtes de somme dont il tire vêtement, nourriture et moyen de transport » (5-6-7-8), « l’eau qui lui sert de boisson et fait croitre les plantes » (XVI, 10-11), « les objets de différentes couleurs » (XVI, 13), « la mer qui fournit poissons et ornements et porte les vaisseaux » (XVI, 211), « les étoiles qui servent à se diriger » (XVI, 16), « l’abeille mellifère » (XVI, 70-71), « la terre pour le repos, le tracé des chemins, les troupeaux et les tombes » (XX, 55-57), « les nuages que Dieu pousse légèrement, réunit par monceaux d’où il fait sortir une pluie abondante » (XXIV, 43), « les animaux qui marchent les uns sur le ventre, d’autres sur deux pieds, d’autres sur quatre » (XXIV, 44), « la nuit pour le repos, le jour pour le travail » (XXVII, 88).
Il y a bien sûr des exceptions dans le christianisme au premier rang desquelles figure Saint François. Ce n'est pas pour rien que notre pape écologiste lui a emprunté son nom et le titre de son encyclique Laudato si’, mi’ Signore. Inversement, quand est-ce que c'est que l'Arabie et les autres monarchies du Golfe enivrées de leur pétrole, de leur climatisation, de leur aviation et de leurs usines de plastique se décideront à respecter la création conformément à la volonté d'Allah ?