Le baiser de la Tosca
Familiers de Milan mais jamais entrés à la Scala, avons profité de la diffusion hier soir en direct de La Tosca sur Arte pour pénétrer dans le sanctuaire cher à Stendhal. Je suis trop peu connaisseur d'opéra pour faire des commentaires avisés autres que sur l'intrigue.
Cette histoire de jalousie me paraîtrait bien rebattue sans les belles inventions du Troisième acte. Pour sauver une vie, celle de son amant, Tosca accepte d'accorder un instant de sa personne à l'infâme Scarpia. Ça m'évoque fort le marchandage imaginé par Stendhal dans la Chartreuse. D'ailleurs, la révolte des patriotes italiens contre la féodalité et contre l'Autriche constitue la toile de fond commune aux deux œuvres. Il y a viol par chantage quand le Prince Esnest-Ranuce IV (ce nom !) marchande à Gina la libération de Fabrice contre son amour. La discussion dure toute une terrible nuit. En réalité le Prince offre le mariage à Gina. Sinon, ce sera la mort de Fabrice, à moins d'une seule nuit d'elle. C'est donc un drame à trois choix. À l'aube, Gina fait le troisième choix et tient sa promesse. Elle couche, Fabrice est libéré, et elle quitte à jamais Parme et sa cour dont elle était le plus bel ornement, au plus grand désespoir du Prince.
La vengeance de Tosca est plus immédiate : Questo e il baccio de la Tosca, C'est ça, le baiser de la Tosca ! s'écrie-t-elle en plongeant son poignard dans le cœur de Scarpia qui s'attendait à ses faveurs.
Bien joué ! Je vous laisse méditer, mon lecteur sur la plus cruelle de ces vengeances de femmes, la mort lente ou la mort immédiate.
Mais finalement, tout s'inversera. Fabrice libéré donnera son amour à Clélia, laissant Gina dans la désolation. Tosca va se jeter dans le vide quelques minutes après son crime en découvrant que son amant a été vraiment fusillé. Les armes n'ont pas été changées à blanc comme l'avait promis l'infâme Scapia. Tosca a admiré le naturel avec lequel son amant a feint de tomber sous les balles du peloton avant de s'apercevoir qu'il avait deux trous rouge au côté droit, comme dit Rimbaud...