Enfin un argument sérieux en faveur des religions

Je lis sous la plume de mon ami, Alain Caillé :

Toutes les cultures traditionnelles ont en commun d'avoir considéré les relations entre les hommes et leur environnement naturel, animaux, plantes, montagnes étoiles, esprit du lieu, génie, etc. comme des relations de don et de contre-don. Il fallait donner ou rendre à la nature pour qu'elle continue à donner à son tour et se montre féconde et généreuse. Peut-être la plus grande rupture de la culture moderne, concomitante avec l'apparition du capitalisme, aura-t-elle résidé dans la rupture radicale avec cette conception. Simple amas de matière et d'énergie, la nature a été considérée comme une fille publique dont il faut se rendre maître et possesseur.

(Extensions du domaine du don, Acte Sud, 2019)

Et pour ceux que le structuraliste intéresse, Alain ajoute :

Le déconstructionnisme nihiliste si dominant en philosophie et dans les sciences sociales aujourd'hui parachève ce travail de désenchantement du monde naturel en congédiant tout idée de naturalité.

Alain est trop prudent pour prononcer le mot de religion. Alors, il parle de cultures, mais tout le monde sait bien que toutes les cultures traditionnelles étaient entièrement gouvernées par la religion. Mais quelle religion choisir ? L'animisme à coup sûr. Rien qu'entre hier et aujourd'hui, j'ai fait trois conversions.

Au bureau de poste de Lourmarin, j'ai gracieusement demandé à la postière s'il ne serait pas plus joyeux par cette belle arrière-saison, d'ouvrir les volets et d'éteindre ces mauvais néons. À la terrasse du café de Cucuron, j'ai prié le livreur en attente de bien vouloir couper son moteur. Au marché de Cadenet, j'ai refusé le sac en plastique dans lequel on a voulu envelopper ma cougourde.

À l'inverse de Sade qui, dans le pamphlet dont je vais détourner le titre, demandait justement que toute fille soit publique, je dirais : Français encore un effort pour devenir animistes ! La nature n'est pas une fille publique !