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Ce petit labour me suffit


Le désir humain se trouve aujourd’hui dangereusement démultiplié.

Depuis que l’homme est homme, son désir est multiplié par la confrontation avec ses rivaux. René Girard a excellemment mis l’accent sur ce phénomène qui fait que les princes veulent posséder des territoires toujours plus vastes, des palais toujours plus grands et plus nombreux avec toujours plus d’or, de marbres, de piscines, de trésors, d’esclaves, de concubines, de bagnoles, de jets et de yachts.

La modernité a ajouté à cela un premier multiplicateur en permettant à tous et à chacun d’accéder à ce qui était le privilège des castes supérieures : cela a nom démocratie. Et moi ! Et moi ! Et moi !

Or, la modernité a ajouté un second multiplicateur aux concurrences ainsi débridées : la technique et le commerce mettent à la portée de tous le moteur à explosion sur terre, sur mer et dans les airs, la matière plastique, elle aussi sur terre, sur mer et dans les airs, des objets jetables, utiles, inutiles ou nuisibles, une alimentation trop sucrée, trop grasse, trop salée, etc, etc. La concurrence des consommateurs fait système avec la concurrence des producteurs et avec la concurrence des commerçants et des financiers : tout le monde est bien d’accord là-dessus : toujours plus de croissance !

Les deux piliers de la modernité, la technique et la démocratie, seraient plutôt bons en eux-mêmes. Combinés l’un à l’autre, ils deviennent aussi explosifs que le mélange du soufre et du salpêtre. L'illimitation des désirs entre en conflit avec la limitation de la planète. D’où viendra le cran d’arrêt ?

La science qui a inventé le moteur à explosion inventera peut-être bientôt le moteur à oxygène et le moyen de capter le CO2 à la source. Elle possède déjà les techniques permettant une agriculture sans engrais et sans pesticide capable de nourrir proprement 10 milliards d’humains.

La politique pourrait interdire l’obsolescence programmée et la publicité, réguler les marchés financiers en taxant les actions vite revendues, mettre fin aux paradis fiscaux, relocaliser les économies en taxant les kilomètres parcourus. Et exposer devant un mur de la honte les oligarques qui auront dérogé aux bonnes règles.

Je suis en train de rêver à un despotisme éclairé qui bousculerait nos mauvaises habitudes pour limiter enfin nos désirs illimités. Tant pis pour la démocratie ! Quand la patrie est en danger, c'est à la force d'imposer les mesures vitales !

Malheureusement ou heureusement, ce que je viens de décrire est juste impossible. Qui fera le dictateur ? À moins qu'il ne débarque d'une autre planète ? Et sa police spéciale ? Un Napoléon de l'écologie ? Encore devrait-il être désiré. On est donc ramené à la volonté populaire. Nos efforts individuels ne pèsent pas lourd mais une nuit du 4 août en faveur du climat est pensable. Un grand J'le fais si tout le monde le fait ! Puisse la vague verte des européennes en être les prémices, emmenée par notre nouvelle Jeanne d'Arc, Greta Thunberg.


Titre : mot de Giono, peut-être dans Que ma joie demeure.


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