Sur la mort d'un oiseau
Pour l'anniversaire de Michèle, tout le monde est venu, de Paris et de Marseille. Les 7 cousins et cousines ont beaucoup cousiné. Samedi, au pied d'un mur, ils ont recueilli une petite mésange blessée tombée de son nid et l'ont installée dans une de ces cages où les chasseurs mettent des appelants. On la réchauffa dans une boule de chiffons, on la nourrit de ces méchantes chenilles asiatiques, dûment écrasées, les pyrales, qui attaquent nos pauvres buis. On lui donna quelques gouttes de vin blanc et au matin du 19, la bestiole chanta. Elle tendit encore son petit bec.
Las, à midi, elle était morte. Larmes et larmettes... L'important n'est pas ce qu'on aime, écrivait Flaubert à Mademoiselle Leroyer de Chantepie désolée de la mort de son chien, l'important c'est d'aimer. On peut lire en latin pour leur musique ces vers de Catulle quand mourut le passereau de Lesbie :
Passer mortuus est meae puellae, Passer, deliciae meae puellae, Quem plus illa oculis suis amabat.
Qui nunc it per iter tenebricosum Illuc, unde negant redire quemquam.
Il faut procéder à l'enterrement chrétien de l'oisillon ! Matilda découpa un mètre de calicot pour confectionner un linceul sur lequel chacun reconnaîtra le mot d'adieu qu'il a inscrit :
On t'a recueilli,
On t'a nourri,
Tu t'es assoupi,
Tu es parti.
P'tite mésange d'amour.
J'espère que tu garderas un bon souvenir de nous même mort.
Mon oiseau !
Retourne au paradis. Je t'aime.
Les ailes noires,
Les cils noirs,
Les yeux noirs,
Le cœur blanc.
Je t'ai vu pour la première fois dans ton nid du muret de pierres. Puis je t'ai retrouvé par terre avec des fourmis te grimpant dessus. Comme tu avais l'air un peu égaré, on t'a ramassé et on t'a pris des couvertures à ta taille, on t'a allumé des bougies pour te réchauffer et on t'a attrapé les plus grosses chenilles des buis de Mina. Le lendemain, on était tout contents que tu aies survécu, on t'a même appris à voler et on t'a promené dans la nature. On t'a beaucoup aimé et j'espère que toi aussi. À la fin, on te donnait à manger, mais tu fermais les yeux et finalement, tu ne bougeais plus !!! ... Mon bébé !!!
On posa des fleurs. Hyacinthe offrit la patate percée d'une ficelle que je lui avais confectionnée. Chacun jeta une poignée de terre. Faustine fit chanter des Amens et des Alleluias et jeter des poignées de terre pour éloigner les mauvais esprits. Un bâton et un amas de pierres marquèrent la tombe de l'oiselet non loin de celle de Minette que nous avons perdue voilà 10 ans. Le chat et l'oiseau enfin réconciliés.