top of page

Le but et le chemin


Une chose m'a toujours troublé dans l'énamoration, comme disent les Italiens. Pourquoi ces préférences absolues, ces goûts et dégoûts fanatiques ? En d'autres termes, quel rapport entre la délicatesse de nos choix et le but, qui lui, est toujours le même tant il est vrai qu'"en amour, les choses ne finissent jamais que de très près", comme dit Valmont. Qu'est-ce que c'est qui compte le plus, le but ou le chemin ? Si on dit que ce qui importe c'est la beauté, le charme, la séduction, le regard, les paroles, la relation, alors, c'est le chemin qui importe et l'acte sexuel n'est qu'une prime de plaisir.

Mais on peut bien soutenir le contraire comme le suggère l'excellent Joseph Kendy. À quoi peuvent bien songer ces jeunes Martiniquais pleins de santé ? Et la fille ? Que cherche-elle donc, là haut perchée ? La forme phallique de ce cocotier vous le dit assez, mes lectrices, avec ses graines.

Comme il est commode que le Je t'aime confonde toute la gamme des désirs. Il me semble d'ailleurs qu'on l'utilise moins aujourd'hui où la vérité du sexe s'avoue facilement. Un voile très léger suffit, genre Je t'offre un verre ?

Soyons matérialiste : si pour l'homme de nature, "toute femelle est bonne", c'est Rousseau qui le dit, pourquoi l'homme de société que nous sommes méprise-t-il tous les raccourcis qui pourraient conduire en un lieu délectable si répandu par le monde et si interchangeable pour valoriser de façon totalement insensée tel être plutôt que tel autre ?

Cela revient à se demander pourquoi la beauté est nécessaire en amour, ou du moins, comme dit Balzac dans sa Physiologie du mariage "une laideur supportable." J'ai 3 réponses qu'on peut éventuellement additionner :

- ce que nous appelons la beauté, c'est en réalité la jeunesse et la santé nécessaires à la reproduction.

- ce que nous cherchons à travers la beauté, ce pourrait aussi être une correspondance avec nos idiosyncrasies les plus intimes, ce qui explique que les hommes ne cristallisent pas tous sur la même femme.

- mais faire l'amour avec la beauté, c'est encore plaisir d'amour-propre, "triompher sur tant de concurrent" dit Proust. Quand Stendhal fait le compte des femmes qu'il a aimées, il conclut tristement que la majorité de ces créatures charmantes, il ne les a point eues. Ce simple mot d'une syllabe, le plus banal de la langue française et le plus passe-partout, dit en réalité fort crûment qu'il ne les a point baisées ! Je crois que ce verbe avoir dit en réalité beaucoup plus : il ne les a point inscrites à son tableau de chasse. Ce n'est pas tant un orgasme manqué qu'il regrette qu'une possession comme le disent de restent les expressions on les as eus, on va les niquer ou on s'est fait baiser...




bottom of page