Des olives en pagaille
Samedi et dimanche on a commencé la cueillette des olives. Jamais les arbres n'ont été aussi chargés. Giono dit qu'il a fait l'expérience de l'avarice en voyant le sac s'arrondir. À l'avarice, il oppose la perte qui seule est noble. D'après lui. En deux jours, on a récolté 1300 kg et on n'a pas dû faire le tiers des 400 arbres que j'ai plantés il y a 20 ans. Il est vrai que cette année, le rendement est médiocre : 13 ou 14 % quand on fait du 20 % les bonnes années. Des chiffres.
Je suis passé au râteau électrique qui permet de tondre un arbre en moins de 10 minutes. On traîne la batterie sur un diable et ça fait tomber un peu plus de feuilles qu'il faut trier après, mais quel abattage ! Le plus urgent est de faire ensuite rouler dans les cageots les olives tombées dans les filets, puis de vider les cageots dans des sacs à patate. Mais surtout, il faut tenir le rythme. Le râteau a une autonomie de 8 heures et doit fonctionner sans interruption si on veut avancer, ce qui suppose que les filets soient débarrassés de leurs prises au fur et à mesure et soient tirés et replacés à temps, dans un jeu de double tapis roulant, de chaque côté de l'olivier dont ce sera bientôt le tour. J'assumai donc le rôle peu apprécié du contremaître, houspillant, c'est le mot de Sabine, les bavards qui, occupés à traire les fruits des branches oubliées par la machine, utilisaient une main à faire des gestes afin de donner plus d'expressivité à leur propos, les petits enfants qui se poursuivaient au lieu de trier les feuilles, ou les rêveurs engourdis dans leur moufles au lieu d'anticiper en allant protéger le sol autour du prochain olivier à scalper.
Ah ! les intellectuels et les poètes dépourvus de tout sens des proportions, qui passent 5 minutes à poursuivre quelques malheureuses olives au lieu d'accélérer la cadence pour finir la rangée avant la nuit, laquelle tombe à 5 heures en novembre !
Quant à Giono, voilà bien un romantique du XX° siècle avec tout le manichéisme que ça suppose ! Ses héros sont tous d'une générosité hémorragique, c'est son mot. Tous les autres sont des prédateurs, qu'ils convoitent l'or, le sexe, ou le sang de leur prochain, j'en ai fait des listes dans des tableaux à deux entrées. Toujours cette polarité outrée entre les deux pôles qu'il ne faudrait jamais dissocier, l'altruisme et l'égoïsme !
Alors, l'or et le sexe, oui, j'en veux. Par contre, le sang, je n'y touche pas...
PS : N'oubliez pas de passer commande pour l'huile, par bidons de 3 ou 5 litres.