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Vanité des arbres généalogiques


Le si excellent livre d’Alice Ferney, Les Bourgeois, raconte trois générations d’une famille, plus de cent personnages, un peu comme Cent ans de solitude de Garcia Marquez, la famille Bourgeois. Ce résultat ne peut être obtenu qu’en système patrilinéaire, c’est-à-dire en élaguant toutes les parentés maternelles. Si on ne l’avait pas fait, on n’aurait pas eu un arbre mais un buisson, une broussaille. Le roman n’aurait pas pu être écrit et les membres de cette famille n’auraient pas pu avoir le sentiment d’appartenance qui les unissait grâce à un lien généalogique simple, puissant, moralement et affectivement mobilisateur. Ce système patrilinéaire est inséparable d’un fonctionnement patriarcal : l’épouse quitte sa famille et rejoint celle de l’homme à qui elle fera de nombreux enfants.

C’est le système universel que nous venons tout juste d’abolir en Mai 68, ceci n’est qu’une formule. Heureuse révolution, c'est-ce pas, mon cher lecteur ? Cependant...

Je vais faire une comparaison. De Gaulle a entretenu le mensonge d’une France résistante depuis 1940, disait récemment Guillaume Erner à Régis Debray sur France Culture, lequel lui a répondu : Ce que vous appelez un mensonge, je l’appelle une fiction utile. Pourquoi utile ? Parce nous avons besoin pour vivre ensemble d’un passé qui nous unisse. Il faut donc un arbre généalogique comme il faut un roman national ? Disons qu’une fois de plus, je vous invite au taoïsme, mon cher lecteur, si on entend par là que chaque vérité comporte une partie d’erreur et inversement.

Autre chose : que deviendrait un arbre qu’on planterait les racines en l’air ? Il crèverait, n’est-ce pas, mon lecteur ! Or c’est ce que nous faisons chaque fois que nous traçons notre arbre généalogique. Nous mettons notre nombril et notre personne à la racine de l'arbre et nos ancêtres dans les branches. Il faudrait tout remettre dans l’autre sens et s’inspirer de l’arbre de Jessé, père du roi David et ancêtre de Jésus, qui a tant de fois été représenté, à partir des Évangiles de Matthieu et de Luc, assis ou couché sur le sol, avec, au sommet, Jésus dans les bras de Marie.

Il me semble que cette remarque rejoint la première dans sa critique de l'individualisme.

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