Un été sous l'Occupation (suite) : de passage à Vichy
Sur la route du retour, d'Angers à Marseille, j'ai choisi de passer la nuit à Vichy afin de pratiquer la vertu de l'insistance, comme dit Giono dans Angelo.
Les palaces où Napoléon III faisait ses fêtes ont presque tous été transformés en résidences ordinaires. Les herbes poussent entre les dalles, les pelouses sont jaunes, les eaux sentent l'œuf. Dans les salons de l'hôtel Aletti, l'un de ces derniers palaces, des figurants en costume Second Empire donnaient un spectacle devant les clients assis sur des fauteuils roulants ou devant des déambulateurs. Dans les rues, entre les pas-de-porte à vendre, des antiquaires s'efforçaient de liquider le mobilier et les bibelots rococos extraits des villas désaffectées. Cela nous a rappelé nos promenades dans la rue Attarine à Alexandrie d'Égypte et ses antiquaires où s'accumulaient les objets saisis après la déséquestration des maisons confisquées par Nasser en 1956.
Quand j'ai demandé à la jeune fille de l'Office du tourisme où se trouvait l'hôtel du Parc, sa bouche s'est tordue. C'était juste à côté. L'un des plus banals. Aucune plaque commémorative. Un digicode. L'entrée envahie par les boîtes aux lettres. Juste en face, le monument aux morts des deux guerres auquel on a rajouté cette plaque :
De 1940 à 1944, sous l'autorité de fait de Philippe Pétain, ont été arrêtées et déportées par mesure de répression ou de persécution plus de 390 personnes, hommes, femmes et enfants nés ou résidant ou travaillant à Vichy. Plus de 240 d'entre elles sont mortes dans les camps nazis Qu'il nous en souvienne !
Nous n'irons plus à Vichy. Les lauriers sont coupés.