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Les Intellectuels ont-ils démérité ?


Je réponds oui, mais pas tous.

Je ne rappellerai pas que le mot intellectuel est apparu au moment de l’Affaire Dreyfus pour désigner les partisans de la justice et de la vérité qui ont fini par obtenir la réhabilitation de Dreyfus : Bernard Lazare, Péguy, Zola, Proust, Jaurès… Un intellectuel, ce n’est donc pas une tête d’œuf qui parle et écrit, a les honneurs des librairies et des médias sous prétexte qu’il a reçu le privilège (ou le vice) de la culture. C’est plutôt quelqu’un qui exerce son sens critique au lieu de hurler avec les loups, quelqu’un qui formule des jugements pertinents et avisés et qui évite de foncer dans le fossé gauche pour éviter le fossé droit ou vice versa.

Prenons le XX° siècle. La modernité capitaliste a suscité deux formes de protestations, l’une à l’extrême droite, l’autre à l’extrême gauche, les uns voulant reconstruire la société au nom de la race, les autres au nom de la classe. On préfèrera certainement la deuxième solution mais le résultat a été horrible dans les deux cas, plus horrible côté communisme parce que le stalinisme a duré plus longtemps que l’hitlérisme : 74 ans contre 12 ans.

Qu’ont fait les intellectuels ? La majorité s’est ruée dans l’une et l’autre ornière. Les héritiers de Barrès ont soutenu Pétain : Céline, Drieu la Rochelle, Jouhandeau, Rebatet, Brasillach, Montherlant, Morand, Claudel. Ils ne méritent pas le beau titre d’intellectuels. Brasillach a même été fusillé.

Ce n’est pas mieux à gauche où les élites pensantes ont soutenu aveuglément Staline, puis Mao. Éluard, Aragon et Sartre sont les cas les plus frappants. Il y en a des centaines d’autres à qui on retirera aussi le titre d’intellectuels car ils s’étaient découverts jusqu’à la taille sous prétexte de se couvrir la gorge. Mais je rendrai son titre au maire d’Armentières, si je me souviens bien, qui a eu le courage de dire à la radio en découvrant les crimes de Staline : « Je suis à poil ! »

Nous savons cela. Parlons plutôt des justes. Je pense immédiatement à Bernanos qui a abandonné l’Action française et Franco quand il a vu les horreurs commises par les phalanges en Espagne et qui s’est tourné vers la résistance et vers de Gaulle. Simone Weil a fait le même chemin en sens inverse. Sinon, qui ? J’en vois surtout 4 parmi les écrivains : Gide, Mauriac, Malraux et Camus. L’étude de leurs œuvres est, comme par hasard, réduite à la portion congrue à l’université.

Et au XX° siècle, me direz-vous ? Quels sont vos maîtres à penser, cher lecteur pleins d’inquiétude et de questionnement ? Moi, je trouve toujours quelque chose à me mettre sous la dent quand j’écoute Finkielkraut, Onfray ou Debray. Ce sont des penseurs de vaste culture doués d’une grande hauteur de vue et d’une belle éloquence, ce qui ne signifie pas que je suis d’accord avec tout ce qu’ils disent.

Et puis, oserai-je le dire ? Bien qu’il ne soit l’auteur d’aucune œuvre, j’ai cru à un sursaut de la pensée française quand Emmanuel Macron a été élu et je m’en suis expliqué dans mes billets des 20 août 17, 29 janvier et 28 mars 18. Le rocardisme, Ricœur, le en même temps social et entrepreneurial, l’Europe, le patriotisme, l'hommage à la littérature.

Je lui fais encore crédit et j’attends...


Photo : une petite fille très hardie plongeant au pied du Mucem.

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