Ya pas kelkun ki veut tomber amoureu de moi ?
Peut-être faut-il se faire à l'idée d'un beau débarquement d'hommes du Sahel dans notre vieille Europe, comme l'appelait Ronald Rumsfeld (mon billet de mercredi). Longtemps conservateur comme vous, ô mon lecteur, j'ai fini par devenir héraclitéen, c'est-à-dire par comprendre que la loi de ce bas monde est le changement. Quand on la chance d'avoir vécu 100 ans, il faut bien savoir lâcher prise et admettre que demain ne sera pas comme quand on trottait en culottes courtes. Pareil pour notre civilisation vieille de 1000 ans et plus, qui a donné tant de beaux fruits, mais qui, malgré ses beaux restes, aurait tort de vouloir faire des ronds dans l'eau encore quelques siècles. De toute façon, le kaléidoscope a déjà commencé à tourner. Le rock, le yé-yé et Mai 68 ont déjà signifié aux croulants que leur temps était fini. Michel Houellebecq et Virginie Despentes ont dressé le tableau d'un monde destructuré. Ils exagèrent, c'est entendu, mais il faut se méfier des poètes car ils sont parfois prophètes. Inutile de pleurnicher sur le lait qui s'est sauvé, comme dirait Vincent : c'est le doigt de Dieu qui trace dans le ciel la courbe de notre destin.
Nous avons le désordre dans la filiation, l'effondrement de tous les tabous, la liberté sexuelle, la pornographie à tous les étages. L'Europe devient une immense rave party à laquelle les islamistes sont les seuls à refuser de participer. Mais les fins de fête sont souvent tristes et je dirai que la solitude pour les perdants est le prix à payer de la libéralisation généralisée que nous vivons.
J'en prends pour symbole le tag qu'on peut lire sur le mur de pignon d'un immeuble de la Canebière donnant sur le Vieux Port : Ya pas kelkun ki veut tomber amoureu de moi ?
Mais bien sûr que si, mon vieux Sö, y a des centaines de millions d'hommes du Sahel de tous sexes qui ne rêvent que de venir combler ta solitude et de régénérer ton vieux sang. Par bonheur, ces Sahéliens sont un peuple magnifique, svelte et drôlement bien gaulé qui nous promet un superbe métissage, oh, les filles ! Je les entends paraphraser Baudelaire :
Nous nous embarquerons sur la mer des Ténèbres Avec le cœur joyeux d'un jeune passager. Entendez-vous ces voix, charmantes des sirènes, Qui chantent : " Par ici ! vous qui voulez manger Le Lotus parfumé ! c'est ici qu'on vendange Les fruits miraculeux dont votre cœur a faim ; Venez vous enivrer de la douceur étrange De cet après-midi qui n'a jamais de fin ? "
Et Dany Laferrière :
Vous savez, nous avons des appareils très sophistiqués dans le Sahara. Le soir, nous vous regardons. L'Europe est une terre giboyeuse, nous martèle-t-on sans cesse. Venez-y chasser les proies les plus appétissantes. Tous ces seins, toutes ces fesses, toutes ces dents, tous ces rires, ça finit par avoir un effet sur notre libido. Vous nous avez rendus fous de désir. Aujourd’hui, vous avez devant vous la longue file des hommes au pénis arqués oh, Europa !