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Un urbanisme et une architecture socialistes ?


Ce n'est pas seulement dans la production et l'entreprise que se pose la vieille question du socialisme.

Permettez-moi d'abord, cher lecteur à la mémoire courte, de vous rappeler que le texte fondateur du socialisme n'est pas le Manifeste de Marx (1848) mais le texte de Pierre Leroux dont je parle tout le temps, De l'individualisme et du socialisme (1834) où il est expliqué que la question n'est pas de tout collectiviser comme le voulaient les saint-simoniens avant Marx, mais de bien pondérer les besoins de l'individu et ceux de la société, en d'autres termes, la liberté et l'égalité. En quoi peut bien consister le socialisme en urbanisme ? C'est des transports en commun confortables, des trottoirs de marbre ou d'autre chose dignes de nos chaussures, une signalétique commerciale harmonieuse, des bancs et des toilettes dans tous les espaces qui ne sont pas réservés à la circulation, des accès partout pour les vieux et les handicapés.

Et en architecture ? Là il y a presque tout à inventer. Le Corbusier avait pourtant donné l'exemple et je suis frappé par la cordialité des relations entre voisins chaque fois que je vais rendre visite à Danielle dans la Maison du fada de Marseille. Il y a, dans le bâtiment, une boulangerie, un restaurant, une école maternelle, une librairie, et, sur le toit terrasse, un espace commun où on peut se retirer pour bouquiner avec piscine pour les enfants et auditorium.

On sait bien que l'un des fléaux de notre modernité, ce sont ces grands ensembles où cohabitent des milliers d'êtres humains enfermés dans quelques mètres carrés sans relations les uns avec les autres. La seule différence avec les prisons, c'est que le verrou de sécurité est tiré de l'intérieur des cellules. Et qu'il n'y a pas de cour pour la promenade.

Dans plusieurs métropoles européennes apparaissent des projets inclusifs, c'est-à-dire qui permettent de mutualiser certaines activités comme la buanderie, le bricolage, le jardin, la garde d'enfants ou la restauration. Presque tout est à inventer pour sortir tant de pauvres êtres de la solitude et du désœuvrement dans lesquels ils attendent la mort faute d'espaces propices et de réseaux permettant aux voisins de partager conversations, repas, services et compétences.

Dans une perspective écologique évidemment : développer le chauffage à partir des eaux usées, promouvoir l'autopartage, transformer les pelouses et les toits terrasses goudronnés en jardins potagers, préférer les fruitiers aux plantes ornementales. Engraisser le tout avec les déchets organiques recueillis par les petits vieux. Ne pas oublier d'élever des abeilles, et transformer la cité elle-même en une grande ruche, ce qui n'empêchera pas les rêveurs, les sur-occupés et les misanthropes de rester chez eux autant qu'ils le voudront.

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