Quoi, derrière le capitalisme ?
Le capitalisme, le libéralisme, je suis bien d'accord avec vous, cher lecteur de gauche, voilà les maux qui ravagent notre planète, ruinent les civilisations et paupérisent des centaines de millions d'hommes . Mais qu'est-ce qui se cache au juste derrière ces mots en isme ? Des hommes évidemment, c'est-à-dire des capitalistes, mais quelle est donc cette espèce apparue apparemment avec les temps modernes ? Il serait bon de le savoir quand nous nous indignons. Quel est l'ennemi ? C'est qui ? C'est quoi ? Ce n'est pas une race puisque les races n'existent pas, ce n'est pas une nation puisque le capitalisme est cosmopolite, fluide comme l'eau ? Alors, ce sont les gros banquiers pleins de graisse, les dirigeants des multinationales, etc. ? C'est vrai, mais nous savons bien que c'est à une hydre à mille tête que nous avons affaire, qu'il en repoussera autant qu'on en coupera et qu'il y en a des millions d'autres qui se tiennent en arrière, moins visibles et moins puissantes mais tout aussi voraces et égoïstes. D'ailleurs, dans notre entourage même, il y a malheureusement des gens qui et que. Et, s'il faut aller au bout, peut-être nous mêmes avons nous un jour éprouvé l'appât du gain et tondu le champ de notre voisin de la largeur de notre langue...
Vous voyez bien où je veux en venir, lecteur perspicace, et je vais vous révéler ma définition du capitalisme : le capitalisme c'est le progrès technologique multiplié par les rivalités humaines. En cela, je jette un pont vers la psychologie si j'ai raison d'aller répétant que la rivalité est alimentée par l'amour-propre blessé. Quelles conclusions en tirer ? J'en vois surtout deux.
D'abord, la faute est commune puisque ses racines sont anthropologiques. Il en résulte que les perdants de la compétition ne sont pas a priori meilleurs que les gagnants. Il est vrai que certains perdants peuvent être plus idéalistes ou plus altruistes ou plus sages mais il est fréquent qu'ils soient tout simplement moins chanceux ou moins doués.
Ensuite, je n'irai pas dire qu'un fléau d'origine psychique, l'hybris, relève d'un traitement psychique et que la justice règnera quand on aura soigné tous les esprits enivrés de compétition. Creuse utopie.
Alors, qu'opposer aux rivalités humaines ? Réponse : la règle. Les sociétés néolithiques n'étaient pas libérales. La religion imposait des règles strictes en toutes choses. Je dis la religion parce que la religion était consubstantielle à la société. C'est elle qui fixait les obligations et les interdits. De toute façon, des techniques rudimentaires ne permettaient pas d'accumuler grand chose.
Nous nous trouvons dans une configuration opposée. Détenteurs de techniques presque illimitées, nous nous sommes affranchis de toutes les règles anciennes en morale, en esthétique, en économie, en sexualité, en poésie, etc.
Conclusion : le rétablissement de règles est nécessaire pour sauver le monde. C'est le point de départ du socialisme : brider l'individualisme concurrentiel par la régulation sociale.
Mais attention à ne pas étouffer la société comme à Cuba, au Venezuela ou en Corée du nord ! Trop de règles, vous asphyxiez le corps social. Pas assez de règles : vous fichez le feu à la pinède !