Jouissons sans entraves !
J'ouvre le dernier livre de Michel Onfray consacré à Mai 68. Il dit qu'une parenthèse de 1656 ans s'est refermée en ce mois de mai-là, celle qu'avait ouverte l'empereur Constantin en se convertissant au christianisme paulinien en 312 = haine de ce monde, détestation du corps, de la chair, des plaisirs, rancune contre les femmes, ressentiment contre la vie en général. Il me semble que je suis d'accord avec ce raccourci suggestif. Et vous, mon lecteur ?
L'Évangile baigne tout entier dans la lumière de la Méditerranée antique, les rues, les lacs, les déserts. Mais la religion catholique est née dans les catacombes. Les horribles persécutions dont furent victimes les premiers chrétiens à Rome donnèrent à son culte la teinte funèbre et lugubre qui nous fait marcher à pas de loup dans la pénombre des églises. Le ressentiment contre la vie transpire à chaque page des manuels de piété qu'on peut feuilleter dans les marchés aux puces et que résume Stendhal dans Le Rouge et le Noir : Au séminaire, il y a une façon de manger un œuf à la coque qui annonce les progrès faits dans la vie dévote.
Les personnages de Virginie Despentes n'ont ni parents ni enfants. Ils vivent dans un éternel présent, sauf un, Sélim, un beur qui a réussi et qui est devenu prof de fac. Le problème est que sa femme qui s'ennuyait à la maison est devenue hardeuse sous le nom de Satana. Un jour, dans un bureau de tabac, leur fille Aïcha, tombe nez à nez avec le sourire de sa mère dénudée posant de façon provocante et obscène sur la couverture d'un magazine. Elle va trouver l'imam le plus ignare et le plus borné qui soit, se convertit au salafisme, revêt le voile et répudie la culture européenne dont se prévaut son père, désespéré. Bien vu, Virginie !
Je vous souhaite bien du plaisir, cher lecteur, pour arbitrer entre ces deux histoires.
Photos prises l'une sur le cours Saleya à Nice en avril, l'autre, rue Saint Fé à Marseille vendredi.